Pourquoi aimer le vin ?

Article du 28-01-2012

 

Pourquoi aimer le vin ? A cette question simple et pertinente, les participants de la journée du 27 janvier à la Société de Géographie ont apporté des réponses claires, riches, cultivées, scientifiques.

Le symposium (mot dont l’étymologie renvoie au Banquet de Platon), organisé par Jean-Robert Pitte, président de l’Académie du Vin de France et de la Société de Géographie a fait salle comble, et l’on reconnaissait dans l’assistance aussi bien des vignerons (Jean-Michel Cazes, Hubert de Montille, le domaine Tempier…), des journalistes (Pierre Guigui, Bernard Burtschy, Denis Saverot, Périco Légasse, Michel Piot, Hélène Piot, Syvie Reboul, Lincoln Siliakus…), des hommes de télé (Mikaël Guedj, Jean-Michel Peyronnet), que des personnalités et écrivains (Robert Tinlot, Michel Guillard, Philippe Massol, Pierre-Marie Tricaud, Henri-Laurent Arnould, Marc Lagrange, François Mauss, Sophie Lignon-Darmaillac, des membres de la Compagnie des Courtiers Jurés Experts Piqueurs de Vins de Paris…).

C’est que le vin, en tant que formule chimique de la civilisation, et accompagné des aménités les plus nobles de l’art de vivre et de la convivialité, mène une lutte toujours d’actualité contre ceux qui pourvoient amalgames, mensonges et inexactitudes scientifiques à un public chaque jour plus grégaire, inculte et obscurantiste (40 % des Français ne boivent pas de vin)… Aujourd’hui, déplore le sénateur Roland Courteau, « la France malmène son héritage ».

 

Les raisons d’aimer le vin

 

Donc, quelles sont quelques-unes des raisons d’aimer le vin ?

C’est la deuxième recette de l’export avec 7 milliards d’euros, répondent les économistes. « Le vin réjouit le cœur de l’homme » souligne dans la Bible (Psaume 104:15) le Grand rabbin Haïm Korsia. Le vin fait communier les cinq sens, précise le père de la Morandais. Le vin est d’une richesse considérable ; il présente 500.000 expressions différentes, énonce le grand œnologue Jacques Puisais. « Le vin est amour » déclame Bernard Pivot, avant de lister les crus les plus favorables à la séduction. Le vin est civilisation, rappelle le sénateur Roland Courteau qui multiplie les propositions de loi, dont la demande de réaliser un inventaire des patrimoines vitivinicoles. Le vin, met en avant Aubert de Villaine, défenseur du dossier des Climats de Bourgogne auprès de l’UNESCO, façonne des paysages, dessine des paysages culturels à valeur universelle exceptionnelle, se nourrit d’une exigence sans cesse renouvelée.

 

L’abus est dangereux

 

Mais l’abus de vin est dangereux, comme tout abus. De tout temps, s’est posé à l’homme le défi du dosage, de la mesure, de la maîtrise.

Soit on interdit, complètement ; c’est la solution choisie au fil des premières années de l’Islam, et qui s’est imposée au monde musulman, alors même que le vin est l’un des fleuves du paradis.
C’est la solution choisie par les Etats-Unis entre 1919 et 1933 avec la prohibition. Pour l’ambassadeur François Bujon de l’Estang, elle a particulièrement réussi à l’industrie de la pègre et des bootleggers, à l’expansion des alcools durs et du Coca-Cola, et à la banalisation… de l’illégalité.

Interdire est facile et donne bonne conscience. Mais interdire, c’est se priver de l’apprentissage de la mesure. Une consommation plaisir est compatible avec la responsabilité et la mesure pour Marie-Christine Tarby. La présidente de Vins et Société déplore la faiblesse des mesures éducatives pour apprendre à gérer le risque dans la boîte à outils du législateur qui comprend encadrement de la consommation, taxes, loi Evin…

Une loi sur la publicité qui, par contagion, limite la liberté d’expression de la presse et suscite des réflexes d’auto-censure chez les journalistes, souligne Michel Bettane, ex-président de l'Association de la Presse du Vin.

Marie-Christine Tarby s’insurge contre ceux qui – au sein même de l’Université ! – arguent que l’éducation est inefficace… Des déclarations qui expliquent peut-être que les missions sur l’alcoolisme des jeunes ne débouchent sur aucune action. Ce n’est pas en se privant d’une éducation au vin que sera résorbée la pratique, de plus en plus précoce, des binge drinking. C’est l’absence même d’éducation au vin qui génère ces pratiques. Selon le Talmud, rappelle Haïm Korsia, « là où le vin fait défaut, le gens vont recourir aux drogues ».

 

Pour une éducation au vin

 

Le vin demande, dans le cadre de l’école, dans le cadre de la famille, une éducation, souligne Laurence Zigliara, spécialiste en pédagogie.
Pour une double raison, parque qu’il est à la fois produit culturel et produit alcoolisé.
C’est donc aussi parce que le vin doit être consommé avec modération, parce que son abus comporte des risques, qu’il demande une initiation, un enseignement à la maîtrise. Il en va de même avec le parachutisme…
Dans l’éducation, qui vise au développement de l’adaptabilité créatrice de l’individu, se rejoignent la tradition dionysiaque du vin et la tradition apollinienne du savoir-boire.

 

Le vin sain

 

Sur le plan de la santé, pour le sénateur Roland Courteau, il y a un paradoxe – dans une société de plus en plus médicamentée, notamment par les anti-dépresseurs - à diaboliser le vin, alors que la science affirme les bienfaits d’une consommation modérée contre le stress, les thromboses et les maladies cardio-vaculaires…
Parallèlement, en pharmacie, on commercialise des gélules d’un de ses composants - le resvératrol

De même, aucune étude scientifique sérieuse ne peut, affirme le professeur David Khayat, conclure aujourd’hui à une incidence d’une consommation de vin sur les cancers… alors que certaines études du ministère de la santé font état de présence de substances cancérigènes (comme l’arsenic) dans certaines eaux, du robinet ou minérales.

 

Des histoires

 

Le vin est culture. C’est un monde riche et complexe.

Comme la grammaire souligne Erik Orsenna (qui occupe à l’Académie Française le siège du premier œnologue, Pasteur), le vin demande à être approché avec patience, à être appris, à être raconté : « quand on est dans le compliqué, il faut raconter une histoire… ».

On ne peut mieux dire qu’il appartient aux acteurs « de la filière » de ne pas se contenter de mettre des notes de dégustation sur des cuvées, mais de mettre des histoires dans nos vins pour en raconter les richesses, pour en offrir la découverte et l’apprentissage.

 

Les Actes de cette journée seront prochainement publiés par la Société de Géographie

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