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Le Tour du Monde épicurien des vins insolites
Article du 20-07-2010
 ou le monde comme terrain de jeu de l'oenotourisme philosophique Claude Gilois a été un des premiers français à s'intéresser aux vins étrangers, au point d'en faire un métier et de créer une société d'importation: Vins du Monde. En Ricardo Uztarroz, globe-trotter et grand reporter, il a trouvé le partenaire idéal (et le "Scribe") pour un livre - Tour du monde épicurien des vins insolites - qui dès l'ouverture, avec des accents de Gérard Oberlé dans Itinéraire Spiritueux (qui s'emporte contre les "tristes gosiers" et les"cafards oenophobes") donne le ton. La lecture en est conseillée aux jeunes et vieux heureux de vivre, et déconseillée aux acariâtres, aux ronchons, aux sermonneurs de tout poil : "Peut-on imaginer un excellent repas sans un exquis digestif et un cigare voluptueux ?" Et Ricardo Uztarroz (qui a couvert un certain nombre de conflits pour l'AFP) d'ajouter : "nous, c'est au comptoir plutôt qu'à la guerre que nous préférons sacrifier nos vies. On n'y meurt jamais sur le champ." "Singes en hiver sexagénaires", "Chasseurs de cru", "Haddock" et "Tintin", "Don Quichotte et Sancho Pança" d'un oenotourisme professionnel (quand même), culturel, et philosophique - donc grave et futile - planétaire, les voilà partis et narrant une balade vineuse et jubilatoire dans des pays où a priori la vigne n'est pas naturelle en raison de la latitude, de l'altitude, du climat, de la transgression des règles élémentaires de la viticulture. Trois repères pour une triangulation pratique : le vignoble le plus septentrional ? la Lettonie. Le plus austral ? la Nouvelle-Zélande. La plus haute ? plus de 2.700 mètres en Colombie. Parfois rejoints par Olivier Poussier (sommelier), Michel Chasseuil (collectionneur, mais, Michel, "le vin n'est pas fait pour être thésaurisé, contemplé, adulé... il est fait pour être bu, comme l'art pour être vécu !"), Jérôme Tournier (réalisateur de Chasseurs de crus), ils nous livrent ce carnet tout-à-la-fois de voyages, de route, de dégustations, de sagesse qui - avec parfois des petits airs d'Easy Rider ou de Kerouac (quoique "ce n'est plus du tout notre genre, ni de notre âge") - embranche les chemins des vignes avec des culs-de-sac, éclaire l'ombre des caves avec les lampes tamisées des lounge d'hôtels, alterne les bonnes cuvées avec les gins-tonics, les Pimm's ou les Mojito, les Daiquiri (voire même, page 186, les Double Papa) avec les pisco sour, les Pino Bali avec les champanskoïe - le tout réglé avec des moyens de paiement aléatoires, incompréhensibles et opaques.
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 On décolle sur la copieuse histoire, en Crimée, de la cave de Massandra près de Yalta (où Staline - en géorgien - se révèle un grand passionné de vin) et les liquoreux comme le Septième Ciel que les auteurs nous ont fait déguster à Saumur. S'ensuivent des étapes turques, japonaises (le minuscule vignoble de 18.000 hectares, et le koshu, cher à Bernard Magrez), thaïlandaises (avec ses vignes flottantes, comme si on faisait des vignes en Camargue à la place du riz, les pieds dans l'eau), cubaines (au vin imbuvable), colombiennes, péruviennes (où la surface du vignoble a crû de 80% en moins de dix ans), argentines pour terminer en Patagonie, bientôt "une référence mondiale". Ce savoureux mille-feuilles d'histoires (et d'Histoire), de dégustations de crus incongrus, de repas "à l'aveugle" ou gastronomiques, d'anecdotes hilarantes, de crus antiques, d'araignées en bouteille, d'éléphants vendangeurs (comme nos jarlots), de tentations (massages boum-boum - "No boum boum, we too much glou glou"), de cépages inconnus (le propolingo-biru, vous connaissez ?), de rencontres (Shinya Tasaki, Hemingway, en bronze creux, Coppola, peut-être, ), de spectacles de boxe... est nourri de réflexions de fond sur le monde comme il va, "preuve que la consommation d'alcool n'altère en rien la propension à penser le monde". L'ouvrage met plus que le doigt sur (l'aube de ?) ce monde nouveau du vin, bourré de perspectives, que nous masque trop le marasme français d'un vin diabolisé : "les vignes sont aujourd'hui une sorte de Polynésie planétaire, chaque vignoble étant une île avec ses caractéristiques propres et des traits communs avec les autres, voisines ou lointaines". Oui, "leurs" vins "rivalisent avec nos grand crus, et parfois leur sont supérieurs". Soyons d'emblée clairs "l'Europe a perdu le monopole de la qualité". Pour terminer sur une note très oenotouristique, quelle est "la plus grande route vinicole de la planète" ?. Un indice, elle fait 34.135 kilomètres. C'est la Panaméricaine entre Prudhoe Bay (Alaska) et Ushuia (en Terre de Feu)... A lire (assis au Wepler, place Clichy) à partir de la page 214.
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 Le Prix de l'Oenotouriste de l'Année 2010 sera remis à l'occasion de la Fête des Vins de Cairanne (Vaucluse) le 25 juillet 2010 aux auteurs Claude Gilois et Ricardo Uztarroz. L'ouvrage figure sur la short-list du Prix du Clos de Vougeot de la Fête du Livre Livres en Vignes. Tour du Monde épicurien des vins insolites - Ricardo Uztarroz, Claude Gilois ARTHAUD - 18 € - Acheter ici
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