L’Âme du Vin

Article du 10-07-2013

 

Georges Ferré s’était intéressé à l’histoire du vin durant la première partie du XXème siècle avec trois ouvrages : 1907, La Guerre du Vin ; Ferroul, Ni Dieu ni Maître et Léon Blum, un Parisien dans les Vignes 1929-1940.

Mystère de l'ambivalence

Il nous offre une plongée avec L’Âme du Vin dans la symbolique et la spiritualité, et livre une passionnante étude en triptyque du vin dans les trois religions monothéistes : 63 pages pour les fils d’Israël, 85 pages pour la religion catholique, 88 pour l’Islam.

Le vin apporte liberté ou confusion à l’esprit, euphorie ou inconscience, bénéfice ou préjudice, convivialité ou affrontement, moyen d’accès à la transcendance ou oubli de la présence du dieu…

En raison du mystère de son ambivalence, c'est une boisson divine donc, forcément divine, et un aliment à apprivoiser et à maîtriser pour les religions.

 

Si je m'abstenais de boire, la science d'Allah serait en défaut

A maîtriser, mais non à interdire. Généralement, les religions – avec la grande exception, complexe, de l’Islam - se méfient autant de l’abstinence que de l’ivresse.

Mais l’ambivalence du vin interroge les religions, jusqu’à organiser - dans le judaïsme - l’apprentissage de la limite avec la fête de Pourim.

Celle-ci est l’occasion de boire du vin « jusqu'à ne plus pouvoir distinguer entre maudit soit Haman et béni soit Mordeh'ai », ce qui n’est pas excès, mais… prise de connaissance de sa frontière.

En effet, si Dieu a créé le vin, pourquoi l'a-t-il créé ? « Allah seul sait tout, dis-tu? Quand il m'a créé, il savait que je boirais du vin. Si je m'abstenais de boire, la science d'Allah serait en défaut. » (Omar Khayyam)

L’ouvrage entre à merveille dans les méandres de l’approche du vin par l’Islam.

Rapidement interdit bien qu’offert aux élus dans le paradis d’Allah, souvent toléré et très souvent célébré comme médication, il est chanté par les poètes - Abu Nawas, Omar Khayyam, Hâfiz de Shiraz… mais aussi admis par certains courants de pensée mulsumans comme les Bektachis, et produit, notamment dans le Maroc contemporain.

Un panorama magistralement brossé, mais pas que...

Georges Ferré suit les pistes nombreuses pour comprendre le mystère de cette boisson considérable, mais les dimensions mystiques et religieuses ne sont pas les seules de l’ouvrage.

Sur l’approche symbolique initiale (la grappe de Canaan et la Terre promise des Juifs, l’Eucharistie des Chrétiens, la boisson des Élus pour l’Islam), se dessinent les mille vies des sociétés méditerranéennes : les communautés (et les routes des vins !) monastiques, les pratiques royales, princières et populaires, l’héritage des hospitalités arabes…

Ce panorama magistralement brossé fourmille de saynètes, d’anecdotes, d’aperçus cultuels, culturels ou sociologiques…

Un certain oenotourisme de valeur 

Avec l’auteur, on se prend à espérer qu’aujourd’hui, « dans l’ancien monde », le vin ne perde pas son rôle culturel immense.

Qu’il continue pour cette richesse sans pareille à être dégusté, mais aussi étudié, recherché, réinvesti, et rendu familier par le développement d’un certain oenotourisme de valeur.

Et Georges Ferré rappelle en souriant que le logo du ministère du tourisme d’Israël représente… une grappe, celle de Canaan.

 

L'Âme du vin
Symbolisme et spiritualité dans les trois religions
Dervy, 18 €

http://ame-du-vin.fr

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