A Gaillac la femme est l'avenir du passé

Article du 12-06-2017

Juin 2017, les vignobles s’interrogent.
Les vignobles de France dans lesquels, sans exception, l’amateur peut aujourd’hui trouver des vins fins, exigeants, de qualité, à des prix surprenants de fraîcheur s’interrogent. Comment se faire mieux connaître ? Comment affirmer sa notoriété et sa valeur ? Sur quels leviers jouer ? Quel sera le déclic qui forcera une reconnaissance plus large ?

Le défi à relever aujourd’hui n’est plus celui de la qualité mais celui de la personnalité, de l’identité du vignoble. Comment faire ?
Si chaque vignoble recèle des vins de qualité, ce n’est pas en affirmant cette qualité, par des guirlandes de médaille ou par des kyrielles de notes dans les guides et les magazines de vin, qu’on donne à comprendre sa personnalité originale.
L’engouement pour l’oenotourisme est aujourd’hui à cet égard un atout stratégique par le contact direct qu'il offre avec les amateurs, oenophiles venus spécialement sur le territoire ou touristes de passage (de nouvelles clientèles potentielles pour les vins) qu’il va falloir séduire et attirer en dépassant l’habituel discours œnologique.
Mais, là non plus, il ne suffit pas d’éditer un annuaire de prestataires (oeno)touristiques avec une attrayante iconographie ou d’afficher un label pour prouver sa distinction par rapport au vignoble voisin. Les florissantes fêtes du vin elles-mêmes, riches de larges clientèles épicuriennes, affirment rarement une identité originale, ce qui dans le contexte fortement concurrentiel du festif notamment estival posera peut-être un problème à de nouvelles initiatives.
Les vignobles sont heureusement de plus en plus nombreux à comprendre que c’est en donnant du sens à leur oenotourisme, en racontant leur Histoire et leurs histoires, qu’ils redessineront leur personnalité authentique et souvent oubliée.
Il faut pour cela prendre conscience de son héritage, le connaitre à nouveau, le protéger, le valoriser, le raconter…

Pigeonniers

« Ces pigeonniers sont à nos vignes ce que les phares sont à nos côtes : des trésors d’architecture » déclare l'oenologue-détective Benjamin Cooker dans La mort du nouveau nez, dernier épisode (mars 2017) du Sang de la vigne de Jean-Pierre Alaux et Noël Balen qui se déroule dans le vignoble gaillacois.

Ces édifices sont le témoignage de l’élevage millénaire des pigeons dont la fiente, la colombine, servait d’engrais jusqu’au milieu du XXe siècle. Au Xe siècle, l’abbé Saint Michel de Gaillac édicta des règles strictes pour la viticulture, dont celle de fumer la vigne avec la colombine, reconnue d’un usage excellent depuis Columelle. L’agronome du XVIIe siècle Olivier de Serres en confirmait la valeur « pour la qualité et la quantité des vins ».

Chaque propriétaire avait son ou ses pigeonniers : de formes architecturales très variées, on en compte aujourd’hui 1 700 dans le Tarn. Mais, comme tout patrimoine, ils sont sujets aux menaces du temps.

La vigneronne est l’avenir du passé


C’est pourquoi il y a deux ans des vigneronnes de l’appellation, près d’une trentaine, se donnèrent un nom - « Les Z’Elles gaillacoises », et l’objet social de collecter des fonds pour contribuer avec un événement festif et champêtre, et une vente aux enchères, à la sauvegarde de ce patrimoine oenoculturel.

En juin 2016, le bénéficiaire en fut le pigeonnier du XVIe siècle du Château Lastours, et cette année les « Z ‘Elles gaillacoises » avaient jeté leur dévolu sur le pigeonnier des Estènes à Fayssac.

Ces restaurations vont ainsi s’ajouter à celles de propriétaires privés, comme par exemple celle, spectaculaire, du Château de Mayragues

Ce week-end du 10 juin, journalistes, vignerons, épicuriens et amateurs de bons vins et de belles pierres avaient répondu nombreux à cet appel ensoleillé, inscrivant ainsi dans la durée cet élément de la partition des patrimoines viticoles gaillacois jouée aussi par l’Archéosite de Montans, le vigneron Robert Plageoles qui a fait renaître les cépages locaux ou le créateur de l’Invincible Vigneron, Théo Elzinga.

Que la tradition dépasse le simple folklore, que le passé viticole soit dans le sens de l’avenir, n’a pu échapper à l’Ordre de la Dive Bouteille de Gaillac qui associe aujourd’hui à la truculence de son Conseil le sens de la communication. Elle a donc adoubé en son sein Michel Lucien, érudit expert de ces nobles pigeonniers…

C’est ainsi que commencent à parler les héritages de notre civilisation du vin et que se dessinent peu à peu les personnalités si différentes de nos vignobles.



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